Chenille processionnaire : un fléau urticant à ne pas prendre à la légère
La chenille processionnaire est sans doute l’une des plus redoutées au jardin, et pour de bonnes raisons. En plus de ravager les pins et les chênes, cette larve de papillon nocturne libère des poils urticants qui provoquent de sévères réactions allergiques chez l’homme et les animaux.
On la reconnaît à sa manière singulière de se déplacer en file indienne, d’où son nom, et à ses nids soyeux suspendus dans les arbres. Dès les beaux jours, elle descend du tronc pour s’enfouir sous terre… et réapparaître l’année suivante.
Le saviez-vous ?
Les poils urticants des chenilles processionnaires sont de véritables micro-aiguilles barbelées, capables de se fixer à la peau, aux yeux ou aux voies respiratoires.
Même un vent léger peut les transporter sur plusieurs dizaines de mètres.
Le danger ne vient donc pas uniquement de la chenille vivante, mais aussi des restes de mue ou de nid.
La chenille processionnaire
Il existe deux sortes de chenilles processionnaires, celles qui colonisent les pins (sapin en second choix) et celles qui colonisent les chênes.
Ces chenilles ont une teinte brun foncé ponctuée de taches rougeâtres sur la partie supérieure des flancs. Leur ventre est jaune et leur tête noire.
Particulièrement velue, la chenille possède deux sortes de poils : des poils blancs et soyeux et de minuscules poils oranges et urticants qui se développent au troisième stade de leur transformation.
Elles se nourrissent des épines des pins ou des feuilles des chênes qui leur servent d’hôte. Cette défoliation freine la croissance des arbres et les fragilise.
La chenille processionnaire du pin :
Larve du papillon de nuit, le Thaumetopoea pityocampa de l’ordre des Lépidoptères, de la famille des Notodontidae. Ce papillon de 35 à 40 mm est gris avec des motifs noirs et des taches blanchâtres.
Autrefois répertoriées sur le pourtour méditerranéen, on trouve désormais les chenilles en Normandie et dans toutes les régions du Nord.
Le réchauffement climatique participe à cette nouvelle répartition.
Le choix des arbres plantés est une autre explication. De plus en plus de pins noirs bordent les autoroutes et les cèdres de l’Himalaya (vendus largement dans les jardineries) sont choisis par les municipalités pour être plantés dans les villes.
La reproduction :
Au début de l’été, à la tombée de la nuit, la femelle envoie des phéromones pour alerter le mâle de sa présence dans un rayon de 4 à 5 km.
Le mâle peut parcourir entre 25 et 50 km pour trouver une femelle.
Après l’accouplement, le mâle meurt.
La femelle va pondre ses œufs dans un pin ou dans un cèdre. Elle meurt peu de temps après.
De la ponte au stade adulte :
Les œufs sont déposés en rangées de 150 à 300 œufs sur les rameaux ou les aiguilles de pin où ils forment des paquets.
Après 5 à 6 semaines, l’éclosion des œufs donne naissance à des larves. Les chenilles passent par cinq stades avant de devenir des papillons, dont trois mues qui leur permettront de passer de quelques millimètres à quelques centimètres.
Ces transformations s’opèrent dans différents nids tissés avec des fils de soie, des restes de mue et des excréments. Légers en été, denses en hiver, on les repère aisément car ils ressemblent à de grosses boules de ouate blanche.
Au printemps, les chenilles quittent les pins pour s’enterrer sous la terre dans un endroit ensoleillé. La procession est conduite par une femelle.
Chaque chenille s’entoure de fil de soie pour construire son cocon.
Commence alors le stade de chrysalide : la chenille se développe pour devenir un papillon ou imago(insecte adulte).
Au début de l’été, le cycle peut recommencer…
Le cycle biologique de la chenille dure un an si les conditions climatiques sont favorables (température, humidité, amplitude thermique). Dans le cas contraire, la larve arrête de se développer en attendant l’arrivée de jours meilleurs. Cette phase est appelée diapause. Elle peut durer plusieurs années.
La procession des chenilles :
Elles se déplacent par centaine en procession ou parfait défilé pour construire un nouveau nid lorsque les alentours de leur habitation n’offrent plus suffisamment de nourriture ou lorsqu’elles quittent l’arbre pour s’enterrer dans le sol.
C’est le contact de la tête de la chenille avec les poils de l’abdomen de celle qui la précède qui assure un déplacement parfait en file indienne.
Elles suivent un fil de soie pour retrouver leur nid.
Cette procession devient dangereuse pour les humains et pour les animaux à partir du troisième stade larvaire des chenilles (voir l’article sur les dangers de la chenille processionnaire), car des poils urticants apparaissent sur la partie dorsale de leurs segments abdominaux.
On la trouve en Europe centrale, en Espagne et en Italie.
En France, elle pullule en Alsace, en Bourgogne, en ile de France, centre, Poitou-Charentes et Midi-Pyrénées.
Différences avec la chenille des pins :
L’éclosion des œufs a lieu avant l’apparition des bourgeons des chênes.
Elles sont capables de rester sans se nourrir (quiescence) jusqu’à l’apparition des feuilles de chêne.
Elles tissent un nid plus résistant contre le tronc ou dans les grosses branches du chêne pour entreprendre leur nymphose (période pendant laquelle la chenille se transforme pour devenir un papillon ou imago).
Risques pour la santé
Dans les 8 heures après contact avec la peau éruption cutanée violente avec vives démangeaisons. La sueur, le grattage et le frottement accélèrent la propagation.
Traitement : retirer ses vêtements avec des gants et les laver à haute température. Les faire sécher dans un sèche-linge. Se rincer vivement à l’eau et au savon. Prendre un antihistaminique et une crème à base de cortisone (vendus en pharmacie).
Dans les quatre heures après, contact avec les yeux conjonctivite et réactions inflammatoires
Traitement : consulter d’urgence un ophtalmologue. Les yeux seront rincés après application d’un anesthésique local. Si certains poils sont plantés trop profondément, ils devront être retirés de façon chirurgicale.
En cas d’inhalation :les voies respiratoires peuvent être irritées (éternuements, maux de gorge, difficulté à respirer, choc anaphylactique).
Traitement : consulter son médecin
En cas d’ingestion : les muqueuses de la bouche et des intestins sont inflammées (salivation, douleurs abdominales, œdème de Quincke).
Traitement : boire de l’eau pour diluer les poils et consulter son médecin. Une endoscopie (exploration visuelle des cavités intérieures) est parfois nécessaire pour retirer tous les poils.
Attention ! les réactions s’aggravent à chaque nouveau contact.
Un danger pour nos animaux de compagnie
Si vous avez un pin, un sapin ou un chêne dans votre jardin ou dans le périmètre où vous promenez votre animal, soyez vigilant, car il peut se retrouver nez à nez avec une procession de chenilles. Curieux, votre chien ou votre chat va chercher à jouer avec elles ou pire à les manger et là, c’est la catastrophe !
En cas de contact, votre animal, notamment le chien, peut développer les réactions citées précédemment et en particulier un choc anaphylactique. Pour chercher à se soulager, il va se lécher ce qui va entraîner une nécrose de la langue. Si celle-ci est trop importante, sa langue peut tomber ou être amputée. Dans certains cas, l’animal ne pourra plus se nourrir et devra être euthanasié.
En cas de doute, il faut conduire votre animal chez le vétérinaire. C’est une urgence vitale.
Traitement : antiinflammatoire, antihistaminique, antibiotique, héparine ou amputation dans les cas les plus graves.
Il n’existe aucune règlementation obligatoire pour éradiquer le nuisible. Cependant devant l’ampleur et le danger que représentent les chenilles processionnaires, certaines municipalités appliquent des arrêtés pour obliger les propriétaires des arbres à supprimer les nids et à mettre en place des traitements préventifs et annuels.
Solutions définitives :
Couper les arbres colonisés.
Évitez la plantation de pins, de chênes et de cèdres dans les zones habitées.
Solutions curatives :
Par pulvérisation en automne sur les arbres d’un traitement à base de Bacillus thuringiensis. En s’alimentant, la chenille va ingérer le champignon toxique et mourir. Ce procédé respecte les autres animaux et les hommes.
Avec un insecticide, le diflubenzuron. En l’ingérant, les larves arrêtent de se développer (se pratique en hiver).
Solutions écologiques :
De façon manuelle. Après avoir repéré les nids, ils sont coupés avec une perche télescopique équipée de cisailles, puis brûlés.
Avec un aspirateur muni de filtres adaptés. Les nids sont incinérés.
Avec un piège à phéromones de synthèse. On place des phéromones femelles dans un récipient enduit de colle. Les mâles attirés vont venir voler au-dessus. Épuisés, ils finiront par mourir piégés sur les parois du récipient. Ce système peut être installé sans danger et limite la reproduction (à mettre en place au début de l’été).
Avec un écopiège. Il consiste à installer un collier totalement hermétique autour du tronc de l’arbre infecté. Celui-ci est relié à un tube qui descend dans une poche en plastiqueremplie de terre. Il est efficace uniquement sur les chenilles processionnaires du pin,carelles seront piégées en quittant l’arbre pour aller s’enterrer. C’est un dispositif sans danger et redoutable.
En installant des nids à mésanges. Ces oiseaux se régalent des chenilles et ne développent aucune allergie. Elles peuvent en manger une quarantaine par jour.
Solution biologique :
Planter des bouleaux. Leur essence est un répulsif pour les chenilles processionnaires.
Attention ! il faut faire réaliser certaines de ces mesures par des professionnels.
FAQ – questions fréquentes
Que faire si mon chien a été en contact avec une chenille ?
Rincez immédiatement la bouche avec de l’eau tiède, sans frotter, et consultez d’urgence un vétérinaire.
Puis-je brûler les nids moi-même ?
Non, c’est fortement déconseillé car cela libère les poils dans l’air. Faites-le uniquement dans un espace sécurisé, ou faites appel à une entreprise spécialisée.
Les traitements chimiques sont-ils autorisés ?
Ils sont déconseillés voire interdits dans les zones sensibles. Préférez les traitements biologiques et les solutions mécaniques.
La chenille processionnaire est-elle présente partout en France ?
Historiquement méditerranéenne, elle remonte vers le nord avec le réchauffement climatique. On l’observe désormais en Bretagne, Île-de-France, Bourgogne…
Est-ce dangereux d’avoir un nid dans un jardin public ?
Oui. Signalez-le à la mairie ou à l’entretien des espaces verts. Une intervention rapide peut éviter de nombreux accidents.
Conseil malin
L’INRA a développé l’application AGIIR (téléchargeable sur play store…). Elle permet à chacun d’identifier les insectes invasifs observés dans sa région et de les déclarer. Ce procédé participatif permet d’alerter les populations à risque.
Prédateurs des chenilles : la mésange, le coucou, la huppe fasciée, certaines espèces de chauves-souris.
Écrit par Jardiner Malin | La rédaction vous propose des conseils d'experts, une approche respectueuse de la nature, de beaux jardins et un potager fait de bons petits légumes cultivés au fil des saisons.