Ces plantes insolites ont le don de fasciner même les plus réfractaires au jardinage. Leurs feuilles étranges ceinturées de poils glanduleux rouges, parfois transformées en pièges à loup ou en urnes colorées, en font des sujets dignes d’un véritable cabinet de curiosités. Leur étrangeté ne tient pas seulement à leur apparence, mais aussi à leur mode de vie très particulier, étroitement lié à des milieux réputés hostiles pour la majorité des autres plantes.
Les plantes carnivores sont parvenues à coloniser des milieux très pauvres grâce à leur faculté à digérer des proies animales en complément de leur fonction chlorophyllienne. Contrairement aux champignons, elles font bel et bien partie du monde végétal : elles possèdent de la chlorophylle, fabriquent leurs sucres par photosynthèse et réclament donc lumière et soleil pour vivre. On les qualifie de « carnivores » lorsqu’elles sont capables :

À l’inverse, certaines plantes piègent par accident des insectes, comme l’arum, mais ne possèdent pas les enzymes nécessaires à leur digestion et ne sont donc pas considérées comme de véritables carnivores.
Pour s’adapter à leur environnement, ces plantes ont développé des systèmes très variés de piégeage : feuilles hérissées de poils englués, pièges en forme de mâchoire se refermant sur la proie, urnes remplies de liquide digestif, feuilles en toboggan menant à une cavité. Une fois la proie piégée, la digestion est assurée soit par des enzymes produites par la plante (cas des dicotylédones), soit par des bactéries vivant dans le liquide des urnes.

Les plantes carnivores appartiennent à diverses familles botaniques (Droséracées, Nepenthacées, Broméliacées…). Elles ont évolué indépendamment vers une même stratégie : compléter leur alimentation en capturant des proies pour survivre dans des milieux très pauvres, tout comme les plantes grasses ont développé des réserves d’eau pour vivre en milieu sec.
Bien qu’elles semblent délicates, les plantes carnivores peuvent se cultiver facilement à condition de respecter quelques règles simples. Tout repose sur le choix du substrat, de la lumière, de la température et de l’eau d’arrosage.
Choisissez un endroit très lumineux que ce soit dans la maison ou au jardin. Dans la nature, ces plantes vivent en milieu découvert, sur des zones sans concurrence d’autres végétaux, hormis la grassette qui peuple plutôt des secteurs légèrement ombragés. Leur capacité à digérer des insectes ne les dispense pas de réaliser la photosynthèse, bien au contraire.
Bon nombre de plantes carnivores sont issues de climats tempérés froids et acceptent de vivre dehors une grande partie de l’année, voire toute l’année pour les plus rustiques. C’est le cas de la Drosera et de la grassette (Pinguicula) de l’hémisphère nord, de la dionée (Dionaea), de tous les Sarracenia ou encore du Darlingtonia.

Pour ces espèces, il est indispensable de respecter une période de froid durant les 3 mois d’hiver. Elles peuvent supporter des températures jusqu’à -12 °C dans une tourbière aménagée, à condition que le substrat reste humide. Au-dessus, une température hivernale proche de 5 à 10 °C convient. En intérieur, ne dépassez pas 15 °C en hiver pour qu’elles entrent bien en repos.
Dans un pot de moins de 100 l, il est plus prudent de placer les plantes dans une serre froide hors-gel, dans une véranda peu chauffée ou dans un local lumineux ne dépassant pas 15 °C. Cette pause hivernale est la clé de leur longévité.
L’eau d’arrosage est un point crucial : utilisez une eau très pure, de l’eau de pluie ou de l’eau déminéralisée pour fer à repasser, ou encore une eau de ville filtrée au travers de cartouches échangeuses d’ions (rayon aquariophilie). Une eau trop calcaire ou chargée en minéraux brûle leurs racines.

Les plantes carnivores comme le Pinguicula, le Drosera ou le Nepenthes forment une excellente association avec les orchidées d’intérieur. En attirant et capturant notamment les mouches de terreau, elles limitent les larves qui s’attaquent aux racines des orchidées. Elles deviennent ainsi de véritables alliées naturelles, tout en apportant une touche spectaculaire à votre collection.
En général, non. Si la plante est en bonne santé et installée dans un endroit lumineux, elle attrapera spontanément quelques insectes. Nourrir manuellement avec trop de proies peut au contraire fatiguer ou faire pourrir les pièges.
La grande majorité des plantes carnivores ne supportent pas les engrais classiques, qui brûlent leurs racines et déséquilibrent le substrat. Seul le Nepenthes peut, éventuellement, recevoir des microdoses d’engrais très dilué, et uniquement si vous maîtrisez bien sa culture.
Utilisez uniquement de l’eau très peu minéralisée : eau de pluie, eau déminéralisée ou eau osmosée. L’eau du robinet calcaire ou trop dure finit par intoxiquer les plantes et détruire le substrat acide dont elles ont besoin.
Certaines le sont, comme plusieurs Drosera, la dionée (Dionaea), les Sarracenia rustiques ou la grassette (Pinguicula) de l’hémisphère nord. Elles demandent alors une véritable période de froid en hiver et un substrat toujours humide, de préférence en grande potée ou en tourbière aménagée.
Placez-les dans un endroit très lumineux, près d’une fenêtre, en évitant les pièces trop chauffées l’hiver. Les Nepenthes aiment particulièrement les salles de bain lumineuses, où l’air reste naturellement humide. Les autres espèces craignent généralement l’air trop sec des intérieurs surchauffés.
Le plus souvent, la cause vient d’un changement brutal de conditions (lumière, eau, température) ou de l’utilisation d’eau calcaire. Rempotez dans de la tourbe blonde pure (éventuellement avec un peu de sable), placez la plante en pleine lumière et arrosez uniquement avec de l’eau douce.